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Moby – Destroyed

Quand Moby sort un nouvel album, la pochette est blanche et le titre, Destroyed, est inscrit sur un panneau d’aéroport à led lumineux. Moby, c’est une sorte de Bill Murray perdu dans une Babel futuriste et policée, mais qui n’aurait pas la politesse de cacher son spleen de Sofitel derrière une apparence de brave ourson taiseux. Pas le genre de la maison. Le digne arrière-arrière-petit-neveu du grand Herman Melville aurait même plutôt tendance à en rajouter.

Ainsi, non content de nous gratifier d’un dixième album de quinze titres, le New-Yorkais nous inflige en parallèle, par le biais d’un livret réunissant 55 clichés pris au quatre coins du monde lors de ses tournées, le récit photographique de ses déambulations en pyjama dans des couloirs d’hôtels anonymes. Ça valait bien le coup de voyager. Mais bon il faut bien reconnaître une chose, ce livret, c’est pas qu’un coup marketing. Il participe quand-même joliment de la vacuité globale du projet. Un conseil, ne vous ruez pas chez Colette, l’exposition des clichés originaux s’est achevée le 4 juin.

J’ai lu quelque part que Destroyed aurait pu sans problème faire office de bande-originale pour le Grand Bleu, vous savez, le film de quand on était jeune avec Jean Reno et des dauphins dedans. Je suis assez d’accord. Sauf qu’il faudrait que le Bleu soit moins Grand et que Jean Reno et les dauphins aillent voir ailleurs. De la musique d’aquarium vide ? Oui, c’est un peu ça. A l’exception de deux ou trois titres un peu plus enlevés, on assiste du début à la fin de ce dixième opus à une litanie de synthés neurasthéniques et de vocoders sous Prozac. Les nappes atmosphériques s’enchaînent et s’évanouissent comme de longs fantômes sonores effilochés. Il n’en restera rien. Ça se voudrait envoûtant mais c’est finalement assez barbant. Moby voudrait fixer ces espaces-temps intermédiaires que connaît tout voyageur lors de ses haltes dans un terminal d’aéroport ou une chambre d’hôtel impersonnelle, ces moments en retrait du monde dans des lieux sans âme, artificiels, où le poids écrasant de l’ennui le dispute à l’attente d’un futur plus exaltant. Son tort est sans-doute de trop bien y parvenir. A trop vouloir témoigner du vide, il semblerait qu’il ait fini par en produire.

Label : Because Music


 

2 réponses sur « Moby – Destroyed »

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