Suite à la sortie de Sans Dormir, le deuxième LP de Bot’Ox. rencontre avec Julien Briffaz et Benjamin Boguet (Cosmo Vitelli) dans leur studio du 11ème. Dur de caler une troisième chaise dans cette pièce déjà bourrée de matos. Un mur de vinyles, un mur de synthés, et des cables, samplers et écrans. Cosmo Vitelli n’a pas dormi de la nuit, pour être dans le thème, assurément. Le duo prend le temps de nous parler de la conception de cet album complexe, de la chasse aux discothèques abandonnées, de leurs clips et d’une de leurs pires expériences de club.
Adnsound : Vous voulez commencer par présenter votre album ? Ce que vous en pensez ?
Julien Briffaz : C’est un disque qu’on voulait un peu plus pop que le précédent. Celui là a été conçu différemment dans la mesure où le premier disque, Babylon By Car s’est étalé sur quatre ans : on ne savait pas trop qu’on allait faire un album au début, beaucoup d’idées partaient à droite à gauche. Sur Sans dormir aussi ceci dit, mais on l’a conçu sur une période de temps plus courte, à peu près une petite année. Il y a donc cette double différence : plus d’intervenants vocaux et une volonté de ramasser un peu le travail, faire un truc plus cohérent et dans l’instant.
Cosmo Vitelli : Effectivement la part des voix change vraiment la couleur d’un disque. Il y avait quatre morceaux chantés sur le premier, là il n’y a que deux morceaux qui sont instrumentaux. Ça donne un coté nettement plus « chanson » sans être formaté de manière « classique » (3 minutes 30, couplet, refrain, couplet, refrain, pont, refrain). Le risque était plus dans l’accumulation des featurings qui peut rendre l’ensemble disparate. Mais on est content de pouvoir bosser avec des chanteurs différents et aller dans des directions dans lesquelles l’un ou l’autre ne pourrait aller systématiquement. C’est vrai qu’un jour on aimerait faire des disques qui soient plus des « blocs », avec une unité de chant notamment. Parce que le chant ça se structure : ça a beau être un instrument parmi d’autres, c’est ce que tout le monde entend.
JB : On est un peu plus mal placés pour en penser quelque chose. C’est aux gens qui écoutent le disque de voir !
CV : Évidemment c’est un point de vue biaisé. La perception qu’on en a varie tellement avec la façon dont il est reçu.
JB : Là on est dans la phase un peu douloureuse où t’en as un peu ras le cul de ton disque. Tu l’as écouté 100 000 fois pour faire les versions, tu t’es posé la question de l’ordre etc. Je prends du plaisir plus 6 mois après tu vois.
ADN : J’ai entendu que vous n’écoutiez pas vos albums une fois qu’ils sont sortis ?
CV : J’ai constaté qu’il y a beaucoup de gens qui vivent dans le culte de ce qu’ils faisaient. Qui écoutent leur propre musique. De mon coté, et je sais que Julien c’est un peu pareil, dès que c’est fait on passe à autre chose.
JB : A l’occasion, quand tu retombes dessus. J’aime bien écouter un morceau de temps en temps. Longtemps après, comme si c’était pas à toi, au milieu de plein de trucs, de playlists en shuffle. Tu tombes dessus, c’est pas désagréable, mais de là à se prendre la tête et à se baser dessus pour voir ce qu’on fera après…
CV : Non mais même, j’en tire pas un plaisir particulier. Les seuls enseignements d’un disque c’est l’idée que tu vas pouvoir faire quelque chose de différent après. Les projets se répondent en fonction de tes envies. Faire des albums, c’est un gros travail de prod’ et d’arrangements. Il y a eu une longue seconde partie qui a consisté à l’épurer. C’est compliqué aussi de rendre les choses simples ! Maintenant on a envie de faire un peu de musique plus électronique, plus club, pour que ça soit moins lourd, moins laborieux. Aussi parce que c’est une envie, qu’on vient de ce milieu. J’ai vraiment envie de regarder dans cette direction à nouveau. Que ça soit sous le nom de Bot’Ox ou de manière individuelle. Notre façon de travailler c’est quand même beaucoup d’enregistrement. Beaucoup d’édit. On prend beaucoup de matériaux. On ne fait pas d’enregistrements classiques où on répète avec un groupe et où on enregistre. Nous on fabrique les morceaux, c’est du mensonge intégral quoi.
ADN : Justement, à deux, comment ça se passe la création d’un morceau ?
CV (s’éloigne chercher un truc et revient) : Précisément comme ça en fait. Petit à petit je vais dans une autre pièce, et puis on se parle plus.
JB : Il y a une partie d’enregistrement au départ. On essaye de trouver des idées avec des gens, on enregistre à plusieurs, on fait des sessions d’une semaine. Et puis après une fois qu’on est en studio on arrange le tout à deux pour que ça finisse par ressembler à un morceau cohérent. Benjamin est plus versé dans les mélodies que moi. J’ai un coté plutôt rythme et technique. Mais on est tous les deux polyvalents.
CV : C’est très rare qu’on écrive une chanson et qu’on essaie de l’appliquer. C’est comme ça que fonctionnent la plupart des groupes, d’ailleurs ça donne une forme assez classique en général. Si tu écris une chanson de manière à ce qu’elle puisse être jouée, tu vas te limiter. Tu vas faire de la musique avec un quatuor en gros, avec des instruments plutôt classiques. Notre instrument principal, c’est le studio. On s’amuse avec tous les instruments qu’on peut faire et qu’on peut avoir à notre disposition… De toute façon, on n’a pas le choix !
JB : Pour le coup les séances d’enregistrement c’est marrant, parce qu’on ne cherche pas la cohérence. En général, en studio, tu fais en sorte que le son soit le mieux possible et après tu enregistres ton truc plusieurs fois. Nous on est plutôt dans l’expérimentation. On va peut être essayer pendant 8 minutes un truc qui est assez nul et pendant 20 secondes il va y avoir un moment de grâce. Et hop on va re-choper ça. Le recaler en studio et faire en sorte que ça soit ça le cocktail principal du morceau.
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ADN : Pour l’instant il n’y a pas de tournée annoncée pour l’album ?
CV : On a réuni toutes les dates en février et mars. Elles sont en train d’être finalisées donc ça sera annoncé bientôt.
ADN : Et ça va se présenter comment du coup sur scène ?
CV : On en a déjà fait quelques unes déjà, pour se chauffer pour l’album. L’année dernière on avait fait quelques dates au Printemps de Bourges pour essayer une nouvelle formule. On jouait un peu comme ça avant, on avait basse, batterie, guitare et synthé parfois. Sauf que maintenant il y a un chanteur en plus, Mark Kerr, qui est sur deux tracks du premier et deux tracks du second. C’est un pote à nous qui est guitariste aussi. Pour assumer le coté un peu plus rock. En l’occurrence deux guitares, basse, batterie et voix. Et des séquences avec l’ordi. A certains concerts, il y a des gens qui n’ont pas écouté ce qu’on fait maintenant et qui sont étonnés. Ils ont des expressions plutôt électro-house dans la tête alors que ça ressemble presque à un concert de rock classique.
JB : En fait c’est des sonorités plus rock mais avec des montages proches de la musique électronique. Des morceaux assez longs, un peu répétitifs avec des trucs qui se rajoutent les uns aux autres. C’est peut-être un peu là où on essaye de mélanger les deux genres. Histoire d’amener ce truc un peu puissant du rock avec une guitare saturée, des sons que tu trouves moins dans la musique électronique mais avec ce truc un peu “transe”, pas des morceaux calibrés de 3 minutes. Un peu rock progressif mais dans le bon sens du terme, sans le coté chiant. Enfin j’espère !
ADN : On a mentionné tout à l’heure les voix, certaines qui étaient déjà sur le premier album sont revenues, il y a aussi deux nouvelles voix. Comment avez vous choisi les collaborations ?
JB : La voix qui est sur « Basement Love » était chantée sur un morceau qui avait rien à voir. Au départ, ce titre était deux fois plus rapide. Qui était plus house et pas terrible en fait. On a refait cette instru en deux fois plus ralenti, et c’est ça qui donne le coté très lent et lourd.
CV : C’est comme ça qu’on fonctionne. On a de la matière et on fait ce qu’on veut avec. C’est le jeu quand tu fais des remix. Souvent tu ne gardes que la voix. Là c’est ce qu’on a fait.. Il y a des morceaux, c’est des blagues, il y a eu genre 30 versions. Des trucs qui ressemblent presque à du dancehall. On s’amuse et on se perd. Et aussi on trouve la faille par moment. Même si le rock est sensé être un truc un peu chevillé au corps et spontané, on essaye de ne pas faire un disque qui parte dans tous les sens.
Pour Samy Osta sur « 2.4.1», on a essayé plusieurs trucs. C’est un pote à nous en fait, il est également producteur sur beaucoup de projet, comme La Femme. C’est le conjoint d’Anna Jean, qui chante sur deux morceaux. Il n’est pas un chanteur en soit mais dans le choix des personnes, plutôt que des restas, on préfère…
JB : Plutôt des Osta !
CV : Ouais ! On préfère des gens avec qui on sait que le morceau va être bien. Enfin de notre point de vue quoi. Après on aime ou on aime pas.
JB : Puis même c’est bizarre de se retrouver avec des gens que tu connais pas du tout en studio. D’ailleurs Foremost Poets a chanté par internet.
CV : Il a pris l’internet comme ça et il a chanté.
JB : On s’est jamais vraiment rencontré.
ADN : Et du coup, vous, vous chantez ?
JB : Non ! Benjamin il fait les voix démos parfois. Il préfère penser que ça ne sera jamais rendu public.
ADN : ça pourrait leaker…
JB : On fait gaffe, on efface scrupuleusement tout.
CV : Nan nan, mais voilà. On a une idée de ce qu’on veut. Tu fais tes notes, tes harmonies, tu fais tout, tu envoies et puis voilà !
ADN : Au niveau de l’artwork du disque, vous les avez dégoté comment vos discothèques ?
JB : Euh, par Google Maps. En l’occurrence la pochette c’est quelqu’un qui nous l’a conseillé.
CV : Au début tu galères. On nous en a envoyé plein via Facebook, parce qu’on cherchait la pochette du disque pour l’album. On en avait fait plusieurs pour les singles. Pour la pochette, c’est un vieil ami du coté de Nantes. Parce que cette ancienne boîte est à 40 bornes de chez lui, je lui ai demandé d’aller en bagnole prendre la photo de ce club qui visiblement était un club assez fréquenté il y a 5 ans. Des gens qui ont acheté le disque nous ont dit “putain j’ai halluciné, c’est un club ou j’allais tout le temps !”.
JB : Il s’appelait le Nautilus. Mais sur la pochette c’est le dos en fait. Le mec il s’est tapé un délire d’architecte. Notre photographe ne prend que des photos avec un vieil appareil qui n’a pas de zoom. C’était galère parce qu’il y a une haie. Tu la vois pas parce que moi j’étais en train de tenir les arbres pour qu’il ait l’angle suffisant, à moitié couché dans la haie. Mais y en a quand même une où on a réussi à avoir le truc. A chaque fois on a fait le voyage, c’est ça qu’est marrant.
CV : Là c’est marrant, on a modifié quelques petits trucs mais il y avait ce coté Drakkar.
JB : Vraiment menaçant, genre vaisseau de l’étoile noire. Au niveau de l’artwork, on est raccord. Y’a une bonne cohérence de sujet.
ADN : Mais du coup même avec les clips, c’est homogène au niveau de l’ambiance. Quelle est votre participation aux vidéos ?
CV : C’est nous qui les initions, qui choisissons, qui imposons la thématique et l’ambiance aux gens.
JB : J’avoue que c’est dur. Pour les clips c’est difficile d’avoir la bonne idée. De faire en sorte de pas dépenser des fortunes. Faut s’accrocher quoi.
CV : Effectivement il y a la dimension financière. Parce que la musique ça vaut plus grand chose à faire, mais pas l’image, même si c’est devenu plus accessible. Hors c’est un élément important pour nous. Autant les pochettes elles-mêmes que les vidéos.
ADN : Chaque EP est sorti avec son clip déjà.
CV : Ouais, c’est vrai que c’était quand même pas léger à faire tout ça. C’est toujours cette difficulté de faire de la cohérence. De garder… (putain je parle comme Hollande) de garder le cap quoi ! Tu vas bosser avec des réalisateurs qui ont rien à voir les uns avec les autres. On aimerait bien bosser avec les mêmes personnes à chaque fois mais c’est impossible. Il y a un clip qui est animé, un clip en Thaïlande, etc. Il faut pas brider les gens avec qui on travaille, en même temps il faut qu’il y ait un fil conducteur. C’est pas simple.
JB : Nous en gros on voulait qu’ils se tiennent au thème de la nuit mais sous un autre angle. Surtout pas montrer les images habituelles de la fête, voir d’autres choses. D’autres aspects. A partir du moment où ça, ça marchait, ça nous allait. Mais je crois que ça va dans l’ensemble, c’est cohérent. Même si encore une fois, c’est un peu comme le disque en fait. Comme ça, tu te dis “Oula, est ce que c’est pas un peu n’importe quoi ? T’as un dessin animé, un truc VHS en Thailande”. Mais je trouve qu’il y’a une cohérence au fond, il faut voir le tableau d’ensemble pour comprendre. C’est sur que les choses prises indépendamment ça peut paraître bizarre comme ça. Le mec qu’écoute 2-3 morceaux de Bot’Ox au pif, il va se dire “Nan mais là je comprends rien, il font quoi comme style de musique ?”. Mais si t’as l’ensemble et aussi la prod, tu vois beaucoup mieux la cohérence.
CV : Objectivement on est aussi la maison de disque et le producteur des vidéos. Évidemment qu’on nous doit des comptes. Il faut quand même que les idées nous correspondent, qu’on estime qu’elles fassent sens dans le projet.
JB : De toute façon quand les mecs sont compétents tu le sens et tu les laisses faire. Le mec pour la Thaïlande il est parti, tout seul avec sa petite VHS.
ADN : Et il s’est bien amusé apparemment…
JB : En fait ça a été dur, il a tourné un premier jour. Avec une vrai VHS. Bon déjà il a fallu caster le mec, les trans, c’est compliqué quand même. Et dans l’immeuble il y avait une antenne relais de téléphone, ça a déformé toutes les images. Il a du retourner tout mais les mecs ne voulaient plus, ça les soûlaient de refaire la même chose. Mais le résultat est vraiment marrant. C’est très, très réaliste quoi.
ADN : L’album s’appelle Sans Dormir. Le record du monde d’insomnie est de 11 jours, quel est le vôtre ?
JB : 11 jours ? Putain nan. Moi je pense, mon max c’est faire une nuit blanche et me coucher vers 5h le lendemain…
CV : Le truc c’est plus le repos que les nuits blanches. Quand t’es vraiment à cran, ton corps prends juste à peine ce qu’il doit prendre pour survivre. Tu fais une nuit blanche, puis une deuxième et à 5h du matin tu dors mais tu es tellement à cran que tu dors 2 heures. T’as dormi mais t’es pas en meilleur état. J’ai eu des périodes ou je fonctionne comme ça, tu fais des 1h par nuit, tu commences à être un peu amoché. Mais ouais, j’ai un bon vécu d’insomniaque.
JB : Ouais parce que Sans dormir, c’est pas vraiment un choix là. C’est pas ce à quoi on fait référence. C’est Sans dormir parce que les situations veulent ça.
ADN : Pour finir, comme sur l’album on n’est pas dans le coté glamour de la fête, votre pire expérience en club ?
JB : Pire du pire ? J’en ai une, mais je sais pas si c’est considéré comme un club. J’avais été booké sur un de mes premiers gigs pour mixer à la fête de fin d’année de Fort Boyard. C’était la société de production qui organisait ça pour les gens et le personnel. En tant que DJ, j’avais 25 ans, c’était avec Loic, mais à l’époque ou on faisait pas encore [T]ekel. J’arrive et le mec aimait la techno donc j’avais pris mes vinyles techno. Je commence à mixer. Ça marchait au tout début. Je vois Passe-Partout qui commence à venir danser avec sa femme. C’était drôle. Et puis y’a un mec, un tekkos, genre un balèze bien bourré qui vient me voir et qui me fait “Ouais, tu veux pas mettre « Tomber la chemise » ?”. Je lui dit que non, je l’ai pas. Il s’en va et il revient une 2ème fois, “Ouais, tu veux pas mettre « Tomber la chemise » ?” Un peu aggressif. “Bah non je l’ai pas j’te l’ai dit”. Il s’en va et il revient une 3ème fois. Donc là je commence à lui dire de me lâcher. Le mec la 4ème fois qu’il est revenu ne m’a même pas parlé, il m’a mis une patate direct ! Évidemment Loïc lui a sauté dessus. Ça fait bizarre, c’est le seul coup de poing que j’ai reçu de toute ma vie. Et le lendemain, on est tombés en panne sur l’autoroute en rentrant. Donc voilà, bon week-end !
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CV : Moi j’en ai plein. J’en ai une vraiment très bizarre, je sais pas si c’est la pire. J’ai fait plusieurs dates au Brésil organisées par un promoteur qui était fou à lier et qui m’a trouvé que des plans foireux. Je crois que le pire, c’était à Florianopolis, une station balnéaire au sud du Brésil. Je me suis retrouvé dans un truc où personne parlait anglais. Un club, un espèce de temple de la drogue. C’était ambiance kétamine. Enfin je sais pas, y’avait pas trop de kétamine il y a 10 ans ? En tout cas j’étais passé l’après-midi, pour voir si tout était bien branché parce que je jouais des vinyles. Le soir il y avait un duo qui jouait avant moi sur des CD, sur un podium au milieu du club. Un des gars jouait de la techno super speed et l’autre jouait du saxophone par dessus. C’était hyper bizarre. Ils avaient des jeans neige, et le mec au sax avait des guirlandes de noël branchées autour de son jean. Il devait penser que c’était cool. C’était hyper agressif leur son. Moi j’attendais mon tour, c’était vraiment grand ce club, ambiance Ibiza mais en 33 tours, tout était tellement irréel. Il y avait même une émission de radio dans une cabine à coté. Le mec m’appelle, je comprends qu’il veut une interview, mais je parlais pas portugais. Le mec me parle en portugais et me tend le micro, alors je disais “What’s the question?”. Là il partait en éclat de rire et après il me retendait le micro. Et pendant ce temps les gens étaient là, tous mous, tous foncedés, à danser, mais rien à voir avec le tempo de la musique.
Le DJ a dépassé d’une heure, j’étais toujours derrière à attendre. Et d’un coup d’un seul il a mis les mains en l’air, et il s’est cassé ! Et moi je suis là, je regarde partout, personne, pas un technicien. Je monte, je mets un premier disque sur la platine de droite, les gens continuaient à danser, ils avaient pas l’air d’arrêter alors qu’il n’y avait pas de musique. Je branche, ça fait un bruit grésillant un espèce de truc, BZZZZ ! J’essaye sur une autre platine, BZZZZ ! Je me retrouve sur une scène, dans une ville, au brésil, je sais même pas où elle est. Personne parle anglais, tous le monde est défoncé, et je me dis, qu’est ce que je fous là ? Je regarde si il y a un technicien pour me dire ce qu’on fait dans ces cas là. J’étais là à gueuler au milieu des gens encore en train de bouger alors qu’il n’y avait pas de musique. À part le podium, il y avait aussi la cabine de la boite, donc je prends une des deux platines et je pars avec à travers les gens. Dans la cabine il y avait le patron de la boite qui parlait 3 mots d’anglais. Je lui disais “y’a un problème”. Il me regardait et il me répétait en me tapant l’épaule “Hey ! Top international DJ !”. Je croise un mec dans la cabine, je lui dis “Musique, Musique”. Il me met une compile sur CD genre Buddha Bar dans un club de dance. Les gens pendant ce temps là, toujours à danser mollement. 20 minutes de rien au niveau du son, juste un peu de trip hop. L’enfer sur terre. Quand j’arrive à brancher mes platines et que je commence à jouer, au bout d’un quart d’heure le patron vient me demander d’arrêter de jouer. Mais c’est une des rares fois ou ça m’a arrangé qu’on me demande d’arrêter. C’était de la dance qu’il leur fallait. Mais des trucs comme ça j’en ai plein.
Je joue souvent dans des réseaux qui sont les mêmes, des gens qui connaissent bien mon label et ce que je fais, j’ai pas de mauvaises surprises mais pendant des années j’en ai eu pas mal. C’est pas toujours agréable à vivre, parfois il y a des décalages. Mais c’est pas triste.
JB : Parfois c’est plutôt marrant.
CV : Enfin les trucs marrants quand t’es DJ, faut être deux. En mode DJ je suis tout seul, c’est par moment beaucoup moins marrant. Je veux pas me la jouer le mec qui raconte des histoire genre Pierre Bellemare. Mais il y a plein de dates que j’ai fais que je n’aurais pas dû faire. Après ça fait des histoires, et j’en ai tout un back catalogue !
Propos recueillis par Joseph Rendu.
Merci à Marion Pace.
Sans Dormir, sorti sur I’m a Cliché.