Bordel, j’étais à cette soirée pleine de gens bizarres et Aymeric me disait bordel, y’a un truc avec les gens ce soir. Et j’ai dit ouais mais tu vois tu places des gens dans une pièce et pourquoi ils seraient obligés de s’amuser, à un moment ils finissent par se rendre compte que c’est pas naturel. Aymeric a dit ouais. Puis rien. Puis il a dit mais pourquoi ils restent alors s’ils se font chier ? Là je savais plus trop quoi dire. J’ai dit prends une bière mais il a allumé une clope et il y avait Foster the People à fond. Un type en k-way vert et en Faguo dansait.
Au bout d’un moment il s’est passé un truc. Un changement de texture. Au début j’ai pas bien compris. Puis j’ai levé les yeux et j’ai vu que le type en k-way vert et en Faguo dansait plus, et j’ai regardé Aymeric et il a dit putain on est en 2011 et j’ai dit c’est pas faux et il a dit il y a encore des gens pour passer Rage Against The Machine en 2011 mais là c’était faux. C’était pas Rage Against The Machine. Fallait pas déconner. On était en 2011.
En général, on déconseille les mélanges. En soirées comme en studios. Ça manque d’élégance et c’est vite assommant. En général. Mais il y a parfois des cocktails qui prennent bien. Biberonné au rock alternatif et au gangsta rap, Hyro Da Hero a su allier les deux dans ses compositions. Si l’expérience n’est pas nouvelle en soi, elle a souvent donné naissance à des projets bancals, à la limite du cabotinage. Dans son Birth, School, Work, Death, le jeune MC originaire de Houston nous prouve qu’on peut poser des punchlines chiadées sur des instrumentaux perfusés de guitares électriques sans avoir l’air d’un cuistre. Connaître son affaire, ça ne s’invente pas.
Le monde s’écroulait, Hyro envoyait sérieusement du pâté et l’autre connard en k-way vert disait ouais mais tu vois c’est pas très ouaté on dirait des pics à glace et la fille en face disait ouais c’est violent je comprends pas et ils avaient pas forcément tort il y avait quelque chose d’animal là-dedans, mais fallait comprendre aussi, et Aymeric a pété un câble, il a dit mec regarde t’as jamais vu ça et il levé son T-shirt, il a pris son briquet et a mis le feu à ses poils et c’est parti de son nombril et ça remontait jusqu’à son sternum et ça crépitait ça sentait la mort il a tapé sur son torse et j’ai rigolé. J’avais jamais vu ça. La chanson s’appelait Ghetto Ambiance.
Chronique : Arnaud Barbey