Une table en bois aux pieds trapus à demi recouverts d’une étoffe violette transparente, sur laquelle reposent les lettres d’un amour défunt. Une bouteille de vin et deux verres à demi pleins d’un nectar rouge rubis qui luit doucement dans la lumière tantôt âpre, tantôt douce de la scène, voilà le décor d’un spectacle inclassable entre chansons, danses, qui s’articulent autour de quelques saynètes à propos de l’amour perdu, du vin et de l’amitié.
Quelques phrases brèves, éclats d’un humour bravache, faussement désinvolte, résonnent sur cette scène intimiste mais profonde, comme le clin d’œil entre deux artistes qui refusent de s’incliner devant les vicissitudes de l’existence tout en les intégrant dans leur spectacle.
A gauche de la scène pour le spectateur, Andrea Bordos apparaît en tenue de concierge coquine, virevolte autour d’un balai, élancée, le maintien d’une droiture que seuls les danseurs peuvent arborer. La jambe longue et galbée s’enroule autour d’une chaise solitaire pendant que son chant passe du français à l’espagnol pour toucher des notes d’ironie mutine, une fierté irrépressible, cette façon d’aller très loin dans l’émotion tout en évitant le registre des lamentations, intensité sans grandiloquence.
A droite de la scène, massif, enroulé dans un long foulard et lové autour de son instrument, Hugo Diaz Cardenas caresse, pince, racle les cordes d’une guitare acoustique acajou, le son résonne et se prolonge dans la salle, telle une grande caverne où se propagent les accords reflets de notre éternelle solitude, les lueurs d’espoir inattendues comme une éclaircie soudaine et les échos ancestraux de la danse-lutte entre homme et femme.
Le chant ample et puissant remplit l’espace sans effort apparent, comme on parle, comme on avoue en confidence ou comme l’on se révolte soudain pendant qu’ Andrea passe derrière un paravent, devenue silhouette comme le souvenir qui refuse de s’effacer tout à fait.
Alors seul le vin rend la douleur plus légère, enfin l’ami arrive, Andrea parée d’un costume noir masculin et d’un haut de forme, qui vient partager quelque déclaration de défi auquel nul ne croit, qu’importe tant chacun se réchauffe autour de ces quelques notes, ces chants qui laissent percer un rayon de soleil qui habite cette grotte sombre.
Un beau et touchant spectacle, coloré de lueurs de complicité entre la danseuse et le guitariste. Un peu moins d’une heure hélas, mais ces évocations trouveront sans doute de beaux prolongements dans le souvenir des spectateurs d’une salle comble et dans d’autres spectacles à venir.
Une réponse sur « L’Improbable Tango – Spectacle – L’Art Studio Théâtre – 10.05.2013 »
L’Improbable Tango une dernière fois sur la scène de l’Art Studio Théâtre dans le cadre du festival Printemps de la Création, c’est le samedi 25 mai à 20h30.
Art Studio Théâtre : 120 bis, rue Haxo Paris 19ème
Réservations sur ast@artstudiotheatre.org ou au 01 42 45 73 25.