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Interview Ysaé – Juillet 2010

A l’occasion de la sortie récente de son album PopArt Lyrical, Ysaé était de passage sur Paris, l’occasion pour nous poser quelques question à cet artiste « multipass » tout droit venu de la planète Mars …

Bonjour Ysaé, pourrais tu te présenter en quelques mots ?
Je me présente en tant qu’artiste multicartes … ça fait 20 ans que je gravite dans la culture Hip-hop et c’est un premier projet solo que j’ai sorti suite aux différentes expériences que j’ai pu avoir par le passé. J’avais envie de présenter un album qui soit représentatif de ce que je suis, c’est-à-dire quelqu’un qui est assez ouvert et qui côtoie toutes les couches sociales …

Par le passé tu as beaucoup travaillé en groupe, comment as-tu abordé les choses ?
Je ne suis pas vraiment en solo car je travaille avec un groupe, c’est le nom d’Ysaé qui ressort mais c’est quand même un travail d’équipe car je suis entouré de musiciens. A l’origine d’un titre il m’arrive d’arriver avec un texte et des idées de structure, dans ce cas eux  s’en inspirent, mais il leur arrivent aussi de me diriger avec une composition qui m’incite tantôt à chanter tantôt à rapper ou à slamer, parfois même à modifier mon texte si eux ne le ressentent pas … C’est là tout l’intérêt de cet échange qu’il peut y avoir avec les musiciens, cette interaction.

Quand tu amène un texte tu ne sais donc jamais à quoi ressemblera vraiment le morceau au final ?
Tout à fait, une fois je suis arrivé avec un texte et pour moi la musique était tellement forte que le texte n’était plus adéquat et j’ai du le réécrire … une autre fois c’est le texte qui était si fort que c’est eux qui se sont adaptés pour lui laisser plus de place … Et c’est pour ça que je n’ai pas trop perdu cette notion de groupe …

Ta musique oscille entre le jazz la soul et la bossa … comment situerais-tu ta couleur musicale ?
J’ai voulu un album qui puisse refléter tout ce que j’ai pu écouter  jusqu’à présent, si j’écoute beaucoup de rap, j’écoute aussi grâce à mon père beaucoup de jazz, de soul et de musique brésilienne. Alors quand tu grandi entouré de toutes ces sonorités, tu as envie de les retrouver dans ta musique, d’où cette palette diversifiée !

Et  quand tu pose tes textes tu as une idée des sonorités que tu aimerais voir derrière?
Et bien non, c’est aléatoire, il n’y a pas de règle ! J’ai juste un repère qui est que quand je bloque sur une instru proposée par les musiciens, je confronte mon texte à la version instrumentale de Melody Nelson et si le texte passe bien dessus, il peut aller sur tout ! C’est un peu le test ultime, et ça à toujours fonctionné – Attention recette de Grand-mère ! – Oui oui sans rire, c’est un truc imparable !

En parlant de texte, c’est vrai que tu chante aussi bien que tu rape … ce n’est pas évident de coller une étiquette sur ton bocal !
En réalité je ne me situe pas sur un mouvement précis, certes mon flow et mon phrasé sont à dominante rap sur cet album mais sur certains titres comme Enfant sauvage, je chante et je n’ai pas envie de me cantonner à un style et de me mettre dans une case, je laisse plutôt l’auditeur se faire son propre avis,  pour moi je fais de la musique et je donne … et ce n’est pas plus mal qu’il n’y ai pas d’étiquette, je ne cherche pas plus à toucher le jeune de banlieue ou que la ménagère de moins de 50 ans !

Ton album est sortit as-tu d’autres projets dans les tiroirs ?
Pour le moment je vais m’occuper de ce projet, c’est un enfant qui vient tout juste de naître et je voudrais le faire grandir … même si je me vois plus dans un univers à la Gainsbourg, très musical dans le futur … c’est qu’il y a quand même trois ans de travail derrière tout ça, toute une équipe, on a même été jusqu’à travailler en analogique pour obtenir le son que nous voulions ! Je vais donc y aller doucement mais surement … Mais là pour l’instant, nous allons aller à la rencontre du public, avec une formule en quintet où je prends un rôle de MC mais aussi  en acoustique où je me positionne plus comme un conteur ou un slameur …

Il ya des choses dont tu n’as pas encore parlé dans tes chansons et qui te tiennent à cœur ?
Oui il y a des choses sur lesquelles j’aimerais parler qui me dérangent, vécues ou non, notamment vis-à-vis de certains médias qui ont sous-entendu que j’avais pris cette nouvelle orientation musicale plus accessible pour obtenir un public plus important vis-à-vis de mon ancien groupe qui avait un public plus restreint d’aficionados … pourquoi n’aurais-je pas le droit d’évoluer, de parler des enfant s au Brésil ou d’avoir une analyse sociologique comme dans « Socialement correct » ? Ils attendent quoi ? que je parle de la vie du quartier uniquement ? … Et j’ai plusieurs thèmes de ce type sur lesquels je travaille.

Tu pense pouvoir bousculer les consciences ?
Oui enfin j’espère … je pense qu’à un moment donné on a un rôle d’éducation. A travers les différents médias ils te disent quoi manger, porter ou acheter … c’est important d’expliquer aux gens que faire de la musique c’est aussi du travail, que n’est pas musicien qui veut et qu’il y de l’intention derrière les notes ! Avec les avancés technologiques tout le monde peut s’improviser musicien et plus personne n’est à sa place … certains programmateurs Radio se prennent pour des DJ et certains organisateurs de festival pour des ministres … on manque vraiment de mecs comme Coluche de Desproges  qui savaient remettre les gens à leur place ! De nos jour on caresse dans le sens du poil, on lève le doigt mais pas trop haut, on crée du buzz et parfois même du faux buzz ! Mais ce qu’il y a c’est que la majeur partie ne prennent même plus le temps d’écouter la musique … on écoute par tranche de trente secondes tout au plus et on se fait des idées courtes ! Aujourd’hui on survole !

Du coup je pense qu’il faut changer la manière de communiquer, passer par la scène pour faire découvrir nos univers … mais c’est vrai qu’il y a de plus en plus de production musicales et que ça ne doit pas être facile de tout suivre !

Il y a gros travail d’image, tes clips sont très fouillés …
En fait, scoop, ma grande force c’est pas d’avoir du talent, mais de savoir bien m’entourer. Du coup je suis aussi bien servi par les musiciens qui m’entourent que par les réalisateurs qui travaillent avec moi.  Tous les clips que nous avons réalisé, et ils y en a d’autres de prévu, ont leur univers propre. Nous allons d’ailleurs essayer  de mettre tous l’album en image ! On se donne deux ans pour tout clipper et faire une petite captation live. Pour le moment nous en avons 5 … Il y a eu Epoque formidable, Enfant sauvage – version courte et longue – il y a Vol XL qui vient de sortir, Second degré est déjà dans la boite (prévu pour la rentrée des classes) et on va tourner Socialement correct d’ici la fin de l’été. Et puis en parallèle je suis acteur et je vais en réaliser un aussi parce que j’ai eu quelques idées sur un morceau qui n’est pas dans l’album, « En phase », c’est un titre avec China Moses , je vais finir de l’enregistrer et je m’occuperais de la vidéo dans la foulée. Je l’ai écrit avec des images plein la tête … j’ai donc déjà le storyboard !

En quittant ce grand marseillais, je me suis dis que les mélanges avaient vraiment du bon et qu’il est rassurant de rencontrer ici et là encore quelques râleurs professionnels … et si en plus ils ont l’accent qui chante …


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